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Nathalie Gonzalez, Nespresso ou une marque pionnière de la fidélisation

No Bullshit
(8 mins)
Dans ce 13ème épisode de No Bullshit, nous avons eu le plaisir de recevoir Nathalie Gonzalez, Directrice Générale Adjointe de Nespresso France pour échanger sur sa vision du marketing chez Nespresso, et comment depuis son arrivée il y a 12 ans, elle a contribué à hisser Nespresso dans le top 100 des marques mondiales.
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Pouvez-vous vous présenter brièvement ainsi que votre parcours chez Nespresso ?

J’ai eu une double vie. J’ai d’abord travaillé chez l’annonceur pendant 17 ans. Ce parcours m’a permis d’appréhender le marketing d’abord. Chez Nestlé, j’ai fait une carrière assez classique (assistante chef de produit, chef de produit, etc…). Ça a été une excellente façon de me former aux techniques rationnelles et quantitatives de marketing des Produits de Grande Consommation (d’abord sur le chocolat puis sur la nutrition infantile).
J’avais l’ambition de devenir directrice marketing et communication. Pour cela, j’avais besoin d’avoir une vision plus fine de la brand. J’ai alors demandé à faire un passage en agence. J’avais envie de comprendre pourquoi, après envoi de brief, j’avais parfois un résultat incroyable, et d’autres fois, un rendu catastrophique. Cette étape a été très enrichissante. Je suis ensuite revenue en tant que directrice marketing à 30 ans. Après je suis tombée gravement malade, avant de revenir en mi-temps thérapeutique.
Mon constat à ce moment-là : j’avais envie de faire un truc que j’aimais vraiment. Qui me faisait vibrer. Je suis partie pour devenir responsable commerciale dans une agence de design cb’a. En parallèle, le monde du digital a émergé. J’ai passé plusieurs années dans une agence de communication CRM/digital Ogilvy One. Les équipes de Nespresso cherchaient un mouton à 5 pattes capable de maîtriser aussi bien le business, le marketing et la communication le tout avec une sensibilité à l’art, au design, à la food. Et qui connaissait Nestlé. Grâce à ma maladie, c’était moi. Je suis chez Nespresso depuis maintenant 12 ans et désormais Directrice Générale Adjointe. Récemment, j’ai repris les sujets de transformation et de RSE.

Comment définiriez vous la marque Nespresso et sa stratégie marketing ?

Nespresso est une magnifique maison, marque de café. Nous venons d’ailleurs de rentrer dans le
top 100 des marques mondiales
. Un peu nos jeux olympiques ! La marque Nespresso est présente dans beaucoup de pays dans le monde, pèse plusieurs milliards d’euros. En France, si la majorité des ventes se font en e-commerce, nous avons aussi 50 boutiques réparties sur le territoire. Pour la petite anecdote, 3% des ventes se font également par téléphone (c’est comme ça que nous sommes nés !).
Nous avons 1200 collaborateurs, sommes labellisés B-Corp (bien qu’en France nous ayons une image négative en RSE sur laquelle nous devons travailler). Le café en capsule, c’est la manière la plus écologique de boire du café. Pourquoi ? Parce que ça permet d’en consommer moins par tasse, 24% d’émissions carbone en moins par tasse, y compris en comptant la capsule.

Vous avez été pionniers sur l’aspect produit avec les machines et capsules. Depuis, de nombreux acteurs sont arrivés sur le marché. Où en êtes-vous ? Quels sont les enjeux du marché ? Comment la nouvelle Gamme Vertuo y répond ?

Récemment, nous avons lancé des capsules en papier compostables à domicile.
Derrière cette gamme, la volonté est surtout de sensibiliser à l’économie circulaire, au compostage ou au recyclage. En effet, les consommateurs ne comprennent pas toujours le rôle de l’aluminium. Certains pensent que c’est un déchet. Un de nos sujets essentiels est de pousser les français à recycler l’aluminium. En effet, la majorité des français ne savent pas qu’à Paris et dans plus de 80% du territoire français, il suffit de mettre l’aluminium dans la poubelle recyclage (celle du carton et du plastique) pour que ce soit recyclé. Nespresso a d'ailleurs beaucoup contribué à financer ces installations.
Par ailleurs, on ne peut s’affranchir de ce type de matériau. Le café c’est comme le vin, c’est fragile et sensible à l’oxydation à l’air et la lumière. Une protection capsule par capsule permet d’avoir du café plus frais, de protéger les arômes, de conserver la qualité du produit.

Avec votre programme RELOVE, vous vendez vos machines à café de seconde main. Votre ambition est d’atteindre un parc de 25 % de machines reconditionnées en France d'ici 2026, quels moyens pour y parvenir ?

C’est effectivement un sujet que l’on a envie de pousser. Le « problème » c’est que nos machines sont très fiables. En d’autres mots ? Très peu de machines ont besoin d’être réparées. Il n’y a donc pas assez de seconde main par rapport au flux de demande.

Quelles synergies avez-vous mises en place entre vos parcours en ligne et vos boutiques pour maintenir une cohérence et enrichir l'expérience client globale ?

Expérience, c’est le mot à la mode mais au fond, ça veut juste dire faire bien son travail, être attentionné pour ses collaborateurs et ses clients. La fidélisation ce n’est pas un programme de fidélité. C’est tout le parcours qui compte. Chez Nespresso, nous avons la chance d’opérer un modèle Direct to Consumer Cela signifie que l’on a une base de données très riche et très complète. On connaît très bien nos clients. Pour quelqu’un de passionnée par les statistiques, comme moi, c’est une chance majeure.. Cette connaissance nous permet d’avoir une vision de la performance complète (avec la partie boutique mais aussi la partie en ligne).
Comme en amitié, quand on parle de fidélité, il y a une part rationnelle mais aussi et surtout émotionnelle. Il est clé de travailler les deux en même temps. Il faut à la fois répondre aux choses attendues (10% en moins sur le tarif du café, réduction pour la date d’anniversaire, etc.) mais aussi être là sur l’inattendu. Chez Nespresso, on essaye de faire vivre des émotions personnalisées.

Comment vous assurez-vous de ne pas cannibaliser les ventes entre les boutiques et le e-commerce ?

Un client multicanal a une consommation incrémentale de 15% vs un client monocanal. Cette question de la circulation de la consommation entre le site et les boutiques est donc importante. Il y a mille et une manières de faire. Une chose est essentielle : les spécialistes café ne doivent pas avoir peur du e-commerce. Cela passe par de la formation mais aussi par un système de management adapté (notamment la partie objectifs).

Auriez-vous un exemple d’action mise en place sur cette partie personnalisation des émotions ?

Nous avons envoyé au domicile des clients des étuis qui portaient leur nom (plutôt que celui du café). À la place d’un étui Ristretto, c’était donc un étui Paul, Clara ou Martine. Cette action a été mise en place à un moment random, pas à une date clé. C’était une surprise à 100%. Pour y parvenir, il y a un vrai enjeu statistique (identifier le produit préféré de la personne, la récurrence d’achat, etc.).
Une autre campagne me vient en tête. Nous avions envoyé à nos clients des capsules neutres en leur demandant de les reconnaître. L’idée ? Ce qu’ils croyaient reconnaître comme leur café préféré ne l’était pas. C’était souvent une autre référence. Résultat ? Ils ont découvert un nouveau café qu’ils aimaient, ce qui a permis par la suite d’augmenter les ventes. Nous pensons en small data pas big data. Nous prônons l’utilisation des données clients pour des choses simples et bien pensées.

Comment challengez vous votre vision marketing ? Comment trouvez-vous de nouvelles idées ?

J’ai une équipe diversifiée, de 20 à 60 ans, des data scientists, des communicants, toutes sortes de profils, et c’est notre richesse. On a mis en place une culture qui fait que l’on a le droit de ne pas être d’accord, de se confronter. Quand mon équipe gagne, ils le savent. Je suis heureuse quand ils parviennent à me faire changer d’avis. Ça ne veut pas dire être une girouette. Ça veut simplement dire s’autoriser à entendre des bons arguments pour modifier son point de vue.

Vous avez fait un partenariat avec Café Joyeux, la marque de café-restaurants employant des personnes en situation de handicap en créant le café en capsule « Nespresso pour Café Joyeux ». Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cette collaboration ?

Je suis très fière de cette collaboration. Nespresso est engagé depuis plus de 25 ans en faveur des personnes en situation de handicap mental, en particulier dans la partie logistique. C’est parce qu’on fait ça de manière sincère depuis longtemps que Café Joyeux a accepté de collaborer avec nous. Pour la première fois dans l’histoire de notre marque, nous avons créé un café sur-mesure pour eux. Il était vendu dans les boutiques Nespresso, sur notre site mais aussi dans les boutiques Café Joyeux. Toute la marge incrémentale a été reversée à Café Joyeux. Ça leur a permis d’ouvrir de nouvelles adresses.

Ce partenariat a-t-il été créé avec une vision à long terme ?

Ce partenariat a permis de générer de l’émotion positive entre une grande entreprise et une petite avec des valeurs fortes communes au service d’une société plus inclusive. Cette collaboration a pris de l’ampleur pour aller en Belgique, au Portugal. Ça a aussi été l’occasion pour nos collaborateurs d’accueillir des personnes en situation de handicap dans les boutiques. De l'autre côté, nos équipes sont allées dans les boutiques Café Joyeux. C’est un sujet qui a été pris à 360 et qui devrait s’inscrire dans la durée. On voulait quelque chose qui a du sens et qui perdure.

Quel serait le/la prochain.e Décideur.se marketing que vous aimeriez voir témoigner dans No Bullshit ? Et la marque qui vous inspire le plus ?

De manière générale, j’aime bien écouter des gens qui ne sont pas des marketeurs (professeur, cuisinier, etc.) parce qu’ils ont un œil nouveau, un regard différent.
Si je devais choisir, ce serait intéressant d’avoir quelqu’un qui vient du monde de la communication des agences de communications, parce qu’ils incarnent le proverbe de l’arroseur arrosé. Ils font des choses merveilleuses pour leurs clients mais très peu pour eux, en tant qu’agence. Je continue à me demander pourquoi.
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